Lettre 4




Rusengese, le 25 mars 1928.



                                    Mon cher papa, ma chère mother,

Je suis sur une copette ( sommet, cime en wallon liégeois ) entourée de nuages, il pleut et il vente ; au hasard des idées, je vais un peu bavarder avec vous, racontant pêle-mêle des nouvelles des T.O. peu intéressantes peut-être, mais les seules que je connaisse.

Je ne pense pas vous avoir écrit longuement depuis mon arrivée à Usa – commençons par là. Je fus reçu là-bas par le brave administrateur Coulon, dont j’ai souvent parlé (et qui rentre fin de terme et de carrière) et par le commandant des troupes T.O. Duvivier (ancien de Kigali).
A Usa, on se déplace en moto ou en auto … en moto donc on me conduit chez le Lieutenant Colonel Pieren, ex-chef de Mission de Délimitation et maintenant, directeur de société commerciale et minière. Je fus très bien reçu et fus heureux de retrouver Black, le vieux chien de Vandenberg, oublié à Albertville et recueilli par des amis …

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Lettre 3




                              Muramvya, 29 février 28


                    Mon bien cher papa,

Me voilà en route. Je suis resté quelques jours à Usumbura pour les courses, visites officielles, etc.. J’ai retrouvé pas mal de vieilles connaissances dont le Lieutenant Colonel Pieren chez qui j’ai logé et pris mes repas en dehors des autres invitations.

Le 20, je suis grimpé à Bagatelle, notre camp de base pour organiser ma caravane et prendre ce dont j’avais besoin. Le chef d’escorte avait sa femme nouvellement accouchée à l’hôpital d’Usumbura et faisait la navette, ce qui m’a retardé.

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Lettre 2





Dar-es-Salam, le 8 février 1928


                                       Mon cher papa, ma chère mother,

Me voici à Dar-Es-Salaam. C’est un four en cette saison. Nous avons débarqué avant hier, tout s’est bien passé ; nous avons évité le débarquement à Zanzibar qui n’avait rien d’agréable, car nous aurions dû y séjourner jusque vendredi prochain en attendant le petit steamer qui fait le voyage en six heures Zanzibar – Dar-Es-Salaam, et ce, dans un hôtel peu confortable.

Ici, l’hôtel est bien, mais on ne sait où se fourrer pour ne pas mijoter dans son jus … la nuit surtout est insupportable, on ne s’endort qu’au matin.

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Lettre 1




S.S. Général Voyron
En mer

Bien chers papa et mother

Nous voguons … le voyage s’annonce très bien. La mer est fort calme et le bateau aussi, nous approchons de Port Saïd … déjà !

A Paris, comme je l’ai écrit de Marseille, je suis arrivé à 13h, puis suis allé faire visite à Madame Laurenty (belle-mère de sa soeur Hortense). Elle allait très bien et n’avait pas de nouvelles spéciales de Tensette (sa sœur), Nicolas (son beau-frère) et bébé (Alice Laurenty) . J’ai rencontré là-bas le docteur Duyck, il ne compte plus retourner en Afrique et pense à se marier et s’installer en Normandie et, en attendant, concourt pour le prix de l’Académie de Médecine. Nous sommes allés voir Jean qui est installé magnifiquement à présent dans de vastes bureaux et magasins. C’est bien, mais c’est un fameux capital à amortir !

Il ne change pas et a l’air fort usé ; à 40 ans, ce sera un vieillard, s’il tient jusque là.

Le soir, j’ai soupé avec Duyck, un docteur français et sa dame que nous avions connus à bord d’ Azay le Rideau , très gentils tous les deux.

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Jass est un terme désignant les soldats (simples soldats) belges de la guerre 14-18 tout comme «poilu» en France» ou «tommy» en Angleterre. On rencontre aussi les termes "piou-piou" et «piotte».
Ce terme, que Léon utilise à plusieurs reprises, nous a intrigué Charles et moi-même et c’est l’ami Google qui nous a sauvé la mise (assez péniblement…).

Jass, qui se prononce «yass» vient du flamand et signifie «veste, manteau». Il s’agirait d’une référence au long manteau d’uniforme de nos soldats de la grande guerre.
Il y a au moins trois ouvrages reprenant ce terme dans leur titre :
- «J’ai vu ! Les misères de nos jass au front» de A. Van Dijck
- «Notre jass de 1914, le soldat belge, par un officier de troupe» par le Général Remes
- «Enfant de jass» sous la direction de M. Gossieaux
Il existe aussi une carte postale montrant le Manneken-Pis en costume de Jass.

On peut toujours voir à Arlon un monument au soldat belge de la grande guerre dénommé «Le jass» (https://be-monumen.be/patrimoine-belge/gaspar-jean/)

Un mémoire universitaire évoque la procédure de désignation du «jass inconnu» et les cérémonies qui s’ensuivirent. (https://www.memoireonline.com/01/14/8532/m_Les-commemorations-du-11-novembre-en-Belgique-francophone-pendant-l-entre-deux-guerres-Les-cas-de27.html)

Enfin, une chanson célébrant les jasses atteste que ce terme concerne tant les soldats wallons que flamands :
Qu'était-ce avant que le canon
Ne gronde à Boncelle, à Barchon,
Qu'un Jasse ?
On répétait sur tous les tons :
« Ce n'est qu'un soldat de carton. »
Le Jasse.
Mais tout à coup il a prouvé
Que ce carton était blindé
Le Jasse ;
Et quand il vous dit « Halte-là »,
On ne passe pas au delà.
A moins d'y laisser sa carcasse.
Le Jasse.

(http://www.1914-1918.be/chansons_du_front.php)

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Le théodolite est un instrument optique de géodésie. Il mesure les angles dans les plans horizontaux et verticaux et sert aux mesures de triangulation (mesures des angles d’un triangle).

C’est une lunette montée sur les deux axes (vertical et horizontal) dont chaque axe est équipé d’un cercle gradué afin de lire les angles.

Calé horizontalement sur un trépied à la verticale d’un point dont on connait les coordonées, il sert en topographie à relever l’angle entre deux repères visuels.

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Kisenyi est l’ancienne orthographe de GISENYI, ville balnéaire du Rwanda sur les rives du Lac Kivu et d’ailleurs rebaptisée depuis 2006 RUBARU.

Goma et Kisenyi sont voisines à cheval sur la frontière Congo-Rwanda et au pied du volcan NYIRAGONGO.

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L’Ile IDJWI, d’une superficie de 285 km2 se trouve sur le Lac Kivu entre le Congo auquel elle appartient et le Rwanda, face aux villes de Goma et Bukavu. C’est, en taille, la seconde île lacustre d’Afrique.

L’île Idjwi fournit des briques et d’excellentes bananes, à la base du fameux KIFUKAMA (haricot et bananes) et de la bière AMAVU G’AKASIGISI (banane et sorgho).

Cette île a la particularité d’avoir été très peu touchée par les troubles ethniques des années 90 et constitue un havre de paix.

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migration de Bakiga

Les Bakiga (un mukiga, des Bakiga) appartiennent au peuple Kiga, bantous vivants au sud-ouest de l’Ouganda et au nord du Rwanda dans la région de Kigezi.
Ils ont fait l’objet de déplacements de population en 1949, 1968 et 1992 au risque actuel d’affrontements communautaires.

Bakiga people

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L’UNION MINIERE DU HAUT KATANGA (UMHK) a été fondée le 28 octobre 1906 par :
• Le Comité Spécial du Katanga (association E.I.C Etat Indépendant du Congo et Compagnie du Katanga (privé)
• La TANGANYKA Concessions Limited (GB)
• La Société Générale de Belgique, à l’instigation de Léopold II

Après bien des difficultés techniques, de logistique et rivalités avec les anglais (qui au départ détenaient 50%), le premier lingot de cuivre fut coulé en 1911 mais il fallut attendre 1925 pour que l’exploitation soit stable.

L’Union est alors dans les cinq premiers producteurs mondiaux de cuivre et le 1er producteur de cobalt et radium dont l’extraction est associée à celle du cuivre.
Parallèlement, la découverte du site uranifère d’une richesse exceptionnelle (teneur jusqu’à 60%) de Shinkolobwe fait de l’Union Minière la 1ère productrice d’uranium via sa raffinerie d’Hoboken.

A l’approche de la guerre de 1940, l’Administrateur Sengier entreprend de mettre à l’abri d’importantes quantités de minerai d’uranium et en fait expédier encore plus aux Etats Unis. Elles serviront au Projet Manhattan de construction des bombes atomiques dont celle larguée sur Hiroshima mettant fin à la guerre avec le Japon.

L’après-guerre fut une époque de grande prospérité. La capital passe de 300 millions à 3 milliards.

En 1960, date de l’indépendance du Congo, l’UMHK devient une société anonyme de droit belge. Par son soutien (non avoué) à l’indépendance katangaise, l’Union Minière traverse une période houleuse vis a vis des autorités congolaises jusqu’à la nationalisation décrétée par Mobutu en 1967 par le transfert de propriété à la Générale congolaise des mines (Gecomin).

L’Union Minière n’est cependant pas morte, se diversifie tous azimut, se réorganise à plusieurs reprises pour devenir en 2001 Umicore.

Source : Mémoires du congo - Industries minières

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Au Rwanda, sous l’autorité du Mwami, existaient des «armées». Il ne s’agit pas d’une organisation purement militaire mais plutôt d’une corporation de type féodal ayant des droits et des devoirs d’ordre social.

Chaque armée recevait un nom et avait une section de combattants et une section de pasteurs. Toutes les vaches que possédaient les membres d’une armée sociale formaient une «armée bovine» qui recevait un nom.
Réglementées et hiérarchisées, ces armées liées à la parentèle devaient avoir l’agrément du roi. Les chefs étaient désignés et révocables

Une de celles-ci, l’armée Nyaruguru réclama la destitution de son chef Rwamanywa au profit du chef Sebagangali dont parle Léon dans sa lettre.

Le chef d’une armée pouvait avoir des intérêts dans des armées différentes, c’est ainsi que le chef Sebagangali, fils de Runanira (sous-chef à Kiramuruzi, au Buganza), a été pasteur en chef du troupeau Izamuje (les sveltes) de l’armée bovine Ingeyo (blanc de colobe), et pasteur en chef du troupeau Ntagishika (pas d’inquiétude) de l’armée bovine umuhozi (le vengeur).

https://amateka.net/rw/le-code-militaire-du-rwanda-precolonial-art1-a-38/
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Musinga (1883-1944) était le fils du Mwami (Roi) Kigeli IV. A la mort de ce dernier en 1895, c’est son premier fils le prince Rutalindwa qui fut intronisé sous le nom de Mibambwe II avant d’être rapidement assassiné par sa belle-mère Kanjogera afin de placer son demi-frère Musinga sur le trône sous le nom de Yuhi V en 1896.

Confronté à la colonisation allemande, il s’en accommoda relativement tandis que les relations avec les premiers missionnaires furent vite tendues. Cet état de fait empira sous le régime de la Colonie belge qui outrepassa le mandat de la SDN (mission de civilisation basée sur un système d’administration indirecte) en appuyant directement l’action des pères blancs.

Refusant de se convertir, le Mwami Yuhi V fut renversé en 1931 par un coup d’état organisé par le gouverneur du Ruanda-Urundi et le vicaire apostolique Monseigneur Classe sous l’accusation «d’égoïsme et lubricité» et ce afin de mettre sur le trône le prince Charles Rudahigwa, avant-dernier roi sous le nom de Mutara III.

Musinga fut alors exilé à Kilembwe au Congo Belge où il décéda le 13 janvier 1944. Vraisemblablement assassiné, son corps ne fut jamais retrouvé…

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Selon Wikipedia ou l’Encyclopedia Britannica, la ville d’Astrida a été fondée en 1920 en hommage à la Reine Astrid.

D’après Léon il s’agissait en fait de la ville de Butare, nom qui a donc été officiellement repris en 1962 après l’indépendance du Rwanda.

Butare dispose d’un aéroport et d’une université (2013).

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Jean MAURY (1880-1953) était Ingénieur en chef et Directeur du Service Cartographique et Géodésique du Ministère des Colonies.

Diplômé de l’École Royale Militaire en 1898, il entre à l’École d’Application de l’Artillerie et du Génie, passe en 1903 au régiment du Génie puis à la Force Publique et est attaché au territoire de la Ruzizi-Kivu en tant que lieutenant en 1905.

En 1909 il démissionne pour entamer une carrière administrative au Ministère des Colonies qu’il entame en participant à la Mission de délimitation Kivu-Ufumbiro pour finir Directeur en 1924.

Il est le père de la géodésie congolaise. Il laisse un ouvrage sur la Triangulation du Congo Oriental publié en 1934. L’extrait illustré ci-dessus mentionne le Lieutenant HAULET comme un des dirigeants de la Mission Cartographique du Ruanda-Urundi et du Kivu.

Répondant à l’appel de Léopold II, le baron EMPAIN (il ne fut baron qu’en 1907) crée en 1902 la C.F.L. Compagnie des Chemins de Fer du Congo Supérieur aux Grands Lacs Africains dans le but de relier le Lac Albert à Stanleyville d’une part et le fleuve Congo à Nyangwwe au Lac Tanganyika d’autre part.
En contrepartie, la C.F.L. a reçu un domaine foncier et un domaine minier dont l’exploitation est confiée à une filiale créée en 1923 : la C.M.L., Compagnie Minière des Grands Lacs.
En 1929, le domaine minier fut soumis à la prospection publique dont la gestion fut confiée à un Comité Minier dirigé par des représentants de la Colonie et des C.F.L.
Plusieurs sociétés minières concessionnaires furent crées à l’instigation de la M.G.L. dont, en 1937 la MIRUDI (Cie Minière au Ruanda-Urundi).

La Compagnie des Grands Lacs a participé activement avec la Colonie et d’autres souscripteurs dont le Boerenbond au Comité National du Kivu, organisme paraétatique créé en 1928 à l’initiative du ministre des Colonies Henri Jaspar en vue d’assurer le développement de la région.

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Importante force chrétienne en Flandre, le Boerenbond (ligue des paysans) est à l’origine (1890) une structure de défense des droits et intérêts sociaux, économiques et religieux des paysans.

Le Boerenbond a investi dans divers secteurs dont le secteur minier africain dont parle avec ironie notre Léon.

De nos jours, il représente toujours la bourgeoisie catholique flamande et est actif dans l’enseignement professionnel en agriculture, la politique, l’agro-alimentaire (AVEVE), les assurances (ABB) ainsi que le secteur bancaire (CERA, KBC, CENTEA).

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Les BANYARWANDAS constituent une des tribus du groupe ethnique Bantou.
Alors que le Congo comporte près de 300 tribus, les Banyaruandas forment la seule tribu du Rwanda, divisée en trois castes : les TUTSIS (14%, propriétaires de bétail), les HUTUS (85%, agriculteurs) et TWAS (1%, ouvriers et domestiques).

En 1936, un décret du gouverneur général du Congo belge crée la Mission d’immigration banyarwanda (MIB) qui organise une migration de banyarwandas vers le nord Kivu afin de suppléer aux besoins de travailleurs dans les mines et plantations.
La famine au Rwanda (1949) a accru cette immigration.

Les tensions politiques et ethniques qui n’ont cessé de toucher le Rwanda et le Burundi après l’indépendance ont provoqué des vagues de migration vers le Congo dont principalement celle organisée entre 1962 et 1964 par la Croix-Rouge internationale et le Haut-Commissariat pour les réfugiés.
Depuis la situation n’a fait que dramatiquement empiré.

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La Cassitérite (SnO2), du grec ancien κασσίτερος, est un minéral dont on extrait l’étain. Combiné avec le cuivre il forme le bronze, utilisé depuis l’antiquité (Age du bronze).

Elle est exploitée principalement dans la zone de Rutongo au nord de Kigali.
Avec Le tungstène et le tantale, le minerai d’étain (tin) fait partie des 3TGs, ensemble de matériaux cruciaux pour l’industrie électronique et est, à ce titre, aujourd’hui âprement convoité dans la région et source d'exploitation sociale et de conflits armés.