Visé eut le sinistre honneur d’être, le 4 août 1914, la première ville martyre de la sauvagerie teutonne.
Durant quinze jours de folie meurtrière, 42 visétois furent tués, la plupart s’enfuirent comme ils pouvaient.
L’église brûla le 10, et le 15, c’est quasiment toute la ville qui fût incendiée, 574 maisons sur 840 furent détruites.
631 visétois auront été déportés mais, heureusement, Léon-Félix et les siens eurent la chance de pouvoir prendre le chemin de la Hollande.
Voici la retranscription du texte manuscrit du Docteur Léon Haulet,
retraçant les événements guerriers qui marquèrent Visé en 1914 et 1915.
Certains mots n’ayant pu être déchiffrés, des xxxx les remplacent.
A l’initiative de Henri Delrée, époux de Suzanne Haulet, ce texte fut publié en partie
par la société Royale Archéo-Historique de Visé en 1994 :
– « Les Notices Visétoises » n° 49-52, dans John Knaepen, « Les plus anciennes rues et places de Visé », 2e vol., tome XIII, mars-décembre 1994, pp. 595 à 600
– « Les Notices Visétoises » n° 53-66, dans John Knaepen, « Les plus anciennes rues et places de Visé », 2e vol., tome XIV, mars-décembre 1995, pp. 802 à 806
https://www.museedevise.be/
- Léon-Félix : 43 ans, 7 mois et 16 jours
- Irma : 36 ans, 4 mois et 1 jour
- Léon : 13 ans, 1 mois et 23 jours
- Hortense-Alice (Tensette) : 11 ans, 2 mois et 23 jours
- Marie : 9 ans, 2 mois et 9 jours
- Charles : 7 ans, 5 mois et 2 jours
- Maurice : 5 ans, 5 mois et 8 jours
- Albert : 4 ans et 1 jour
- Lucie : 2 ans, 8 mois et 17 jours
- Suzanne : 9 mois et 30 jours
James, le benjamin de la famille, naîtra en Angleterre le 19 décembre 1915.
Récit des événements 1914-1915
Samedi 1er août 1914
Minuit : le tambour bat dans les rues de Visé : mobilisation générale !
Dimanche 2 août
De nombreux troupeaux de bestiaux et charrettes à foin sont dirigées vers Liège.
Lundi 3 août
On mine le pont à Visé ! Pas de distribution de prix au Collège St-Hadelin : Léon et Charles sont renvoyés par les soldats de garde.
Patrouilles et gardes civiques à cheval. Toutes les routes sont gardées militairement. Fernand (MAGIS, frère d’Irma MAGIS, mon épouse) me fait dire par H. ANDRIEN de partir pour Liège. Visite au commandant de la gendarmerie.
19h : conseil : restez avec votre famille.
22h : Deux détonations formidables précédées de sonneries de clairon : les ponts de Visé et d’Argenteau sautent !
A 23h : visite et soins au garde à cheval CHAUVIN ( fils d’un professeur à l’université de Liège) chez CHARLIER BROUHA; demain, me dit-il, vous serez sous la domination teutonne. Je rencontre un groupe de civils discutant les événements : les gendarmes de Gemmenich avaient annoncé la violation du territoire par les troupes allemandes, d’où fausse alerte!
Mardi 4 août
4h du matin : formidable détonation : la destruction du pont à Visé n’était pas suffisante, on recommence. Cette fois c’est réussi. Toutes les vitres des maisons sont brisées jusque chez GALERE-DELAMBREMONT.
6h : le tocsin sonne. Les civils sont réquisitionnés par ordre des autorités militaires pour accumuler des obstacles sur le passage des troupes allemandes : route de Berneau, Dalhem, Mouland.
10h : gendarmerie, le commandant me déconseille d’aller à Mons où j’ai un malade. Les Allemands, me dit-il, ont franchi la frontière; les Hollandais les laissent passer, ce qui n’était pas exact.
A 11h1/2, les premiers cavaliers Teutons sont en vue sur la route à Berneau. Tous les gendarmes à Visé et les brigades frontières filent vers Liège en criant : « Vive le Roi ! Vive la Belgique ! ». A la demande du commandant HAUSMAN, j‘arrache l’appareil téléphonique de la gendarmerie, je ferme la porte et vais remettre la clef au bourgmestre. Déjà, toutes les rues sont désertes, portes et fenêtres sont closes, un silence de mort règne sur Visé !
A 12h 1/2, j’entends une vive fusillade : du grenier, je vois qu’il s’agit d’un engagement au pont à Visé.
A 1h 1/2 on entend des cris, des pleurs dans la rue à de la Fontaine; au même instant éclate une fusillade endiablée et ininterrompue : ce sont les Uhlans qui font leur entrée dans Visé, précédés de civils dont DEJARDIN blessé au bras par une balle, Simon LEROY, père, Xhignisse HARDY et ils forcent ceux-ci à marcher devant eux. Ils avancent sur deux files, tirant dans toutes les fenêtres, criant et hurlant comme des démons ! Déjà ils ont tué quatre civils : CHARLIER Gilles et BROUHA Jacques et les JULIEN, père et fils.
En même temps, le fort de Pontisse commence à bombarder Visé ! Nous nous réfugions dans la cave après que Phine eut failli être tuée par une balle dans la chambre à l’étage et Maria vient bientôt nous rejoindre.
Tout à coup, un choc formidable ébranle toute la maison ! Un obus a frappé celle-ci. Le salon est complètement saccagé. Au même moment, un incendie éclate dans la grange Lehaen ! Bientôt, grange et maison sont en flammes. En même temps, des soldats dévalant de Lorette, tirent dans la maison; ceux qui se trouvent sur la route de Jupille font de même.
Nous croyons notre dernière heure arrivée ! Et nous récitons tous ensemble notre acte de contrition !!
Après une demi-heure, ne nous jugeant plus en sûreté chez moi à cause du tir du fort, nous décidons de nous réfugier chez Maria ! Au même instant, deux soldats frappent à la porte avec la crosse de leur fusil ! Heraus ! Heraus ! Ils font sortir tous, hommes, femmes et enfants ! Nous sommes tous dans la rue et la plupart de nos compatriotes sont dans le même cas !
Tous doivent défiler rue de la Fontaine, devant les cadavres des deux BROUHA, étendus sur le trottoir devant leur demeure, sous les yeux de sa femme et des enfants ! O Kaiser ! dès le 1er jour d’occupation, nous devions être édifiés sur ton compte !
Le soir, un fort parti d’infanterie, beaucoup de soldats croient être à Paris en huit jours ! Pour d’autres, la France est de l’autre côté de la Meuse. Déjà, ils disent que les civils ont tués des officiers.
La maison Mathoul est également en flammes, défense est faite de se servir des pompes à incendie !
Nous passons la nuit dans la cave chez Maria : les sept ainés sont couchés tout habillés sur deux matelas et Suzanne dans sa voiture . Et ce sera ainsi chaque nuit jusqu’au 12 août.
Mercredi 5 août
A partir de ce jour, nous verrons, avec douleur, défiler toutes les troupes allemandes : infanterie, cavalerie, artillerie… le jour et surtout la nuit ! Et des autos par centaines et un nombre incalculable de camions automobiles ! Toutes les nuits sont troublées par des duels d’artillerie. Tous les blessés sont transportés en Allemagne, à l’exception de quelques-uns soignés au collège St-Hadelin et un certain nombre à Maestricht.
Jeudi 6 août
Soins à Honoré COSME à l’hospice. Le malheureux père de famille a été arrêté le 4 août par les teutons; ils ont tiré sur lui puis il a reçu un coup de baïonnette et est resté abandonné dans la campagne pendant 24 h sous d’horribles souffrances. Après quelques heures, il est mort à l’hospice. J’ai constaté une plaie à l’abdomen – 30 cms de long – les intestins sont à nu; balle dans l’abdomen, balle dans la région sous-claviculaire.
Vendredi 7 août
Deux soldats frappent à la porte : ils font la visite domiciliaire pour constater si on ne cache pas des armes. Réquisition des armes, elles sont jetées dans la Meuse.
Samedi 8 août
La veille au soir ( 9h ), roulement de tambours. Le lendemain à 7h du matin, tous les vélos doivent être amenés au pont de Visé.
Dimanche 9 août
Monsieur le Doyen annonce aux paroissiens que les autorités Allemandes ont déclaré que Visé serait épargné si la population restait bien calme !
Fiez-vous à la parole de ces teutons !
Lundi 10 août
A 10h du matin, j’aperçois un soldat dans la tour de l’église et un caisson sur la place de l’église.
Vers 1h, ordre de sortir des maisons. Heraus ! Heraus ! Irma, Maria et les enfants sont dirigés vers l’hospice et je vais rejoindre par la rue Haute le groupe d’hommes de mon quartier. Pendant que nous sommes gardés par des soldats, leurs compagnons pillent les magasins de la rue Haute !
Vers 2h 1/2, on entend une forte détonation : on voit que c’est la tour de l’église qui saute. C’est la flèche qui gène les teutons, c’est paraît-il un point stratégique !
Je rentre chez moi et je vois la tour qui commence à flamber. Bientôt, une partie de la tour s’effondre et tombe sur le toit de la nef droite. Le feu se communique au transept et au bout d’une demi heure, les visétois affolés et terrifiés assistaient, la douleur dans l’âme, à la destruction complète de leur antique et superbe temple.
Quel sacrilège ! C’est la Kultur ! La flèche et la tour gênaient ces soldats du Kaiser et ils font flamber toute l’église ! Gott mit uns !
Le soir à 6h, arrestation de M. le Doyen, du bourgmestre et de deux soeurs à Notre-Dame : ils sont pris comme otages et conduits aux « Trois Rois » route de Berneau.
Samedi 15 août
Messe et vêpres dans la chapelle de l’école moyenne.
Nuit du 15 au 16 août
Vers 9h du soir, nous sommes réveillés par les mitrailleuses qui parcourent les rues de Visé en tirant continuellement.
A 11h, on frappe à la porte, ce sont les voisins effrayés qui nous apprennent l’incendie de la rue du Pont.
Dimanche 16 août
Nous sommes prêts à nous rendre à la chapelle de l’école moyenne pour la messe du dimanche, il y a contre-ordre. Phine revient ignorant le motif. Pendant ce temps ( nous l’avons seulement appris plus tard ), les boches faisaient sortir des maisons les hommes et les faisaient prisonniers; au nombre de 58, ils furent conduits en Allemagne en 2 groupes vers 4 h, après être restés depuis le matin sur la place de la gare, la plupart à moitié habillés.
A 9h, nous sommes avertis que Visé sera brûlé complètement, mais nous ne pouvons croire cette affreuse nouvelle. Maria vient chez moi où nous étions rentrés le matin et dit : « les Allemands font sortir tout le monde des maisons… ! »; je réponds : « Je ne sortirai que si on nous y oblige » et je prie Irma de se tenir dans le corridor avec tous les enfants : Suzanne avait alors 10 mois ! Nous parlementons avec différentes personnes, entre autres avec mon confrère le docteur Melen qui m’affirme que les hommes ne sont pas admis à passer en Hollande !! Maria s’adresse à plusieurs officiers, les réponses sont contradictoires. Enfin elle se décide à aller trouver l’officier commandant les troupes de Visé et revient avec la réponse : « Visé doit être complètement brûlé !! Sauvez-vous où vous voulez, si vous avez des enfants, portez-les ! ».
Il faut donc quitter cette maison qui nous est si chère, remplie de souvenirs de nos chers parents et de toute notre famille ! Mais nous n’avons pas le temps de réfléchir ! Déjà, les bandits sont devant chez Eugène Jowa, poussant une charrette à bras remplie de bidons, ils vont de maison en maison pour y mettre le feu !
Nous partons par la route de Dalhem, le chariot de jardin des enfants est rempli de couvertures en laine car nous ne savons où nous allons, ne sommes-nous pas logés à la belle étoile ?
Derrière nous, spectacle douloureux et inoubliable, Visé ma ville natale flambe ! Je n’aperçois déjà plus le clocheton de notre vieil hôtel de ville tant la fumée est intense !..
Arrivés près de Dalhem, nous nous arrêtons avant d’entrer dans le village parce que nous voyons défiler des troupes boches sur la route de Dalhem à Richelle. Quelques minutes de repos et nous voyons déboucher, au tournant de la route, une centaine de femmes et enfants visétois ! N’allez pas à Dalhem, les Allemands y sont et tirent de tous cotés ! Nous rebroussons chemin avec les fugitifs et décidons de nous diriger sur Mons tandis que toute la troupe part vers la frontière. Nous arrivons chez JACQUINET dans un état de dépression facile à comprendre !
Lundi 17 août
Le matin, Maria rentre à Visé avec Mlle LENAIN qui nous avait accompagnés lors de notre retraite. Nos maisons ne sont pas encore brulées et trois officiers conseillent à Maria de rentrer chez elle « vu qu’on ne continuera pas à incendier les maisons ». Parole d’Allemands, fiez-vous-y !
Mardi 18 août
Nouvelle rentrée de Maria à Visé. Elle revient vers 11h : « Tout a brulé !! ». Nous sommes dans la désolation !!
Mais il n’y a plus à hésiter, il faut chercher refuge en Hollande et de suite car Mons n’est pas un lieu sûr : les boches ont déjà menacé de bruler tout parce qu’on avait tiré !
A 11h 1/2 nous partons par Berneau : au tournant de la route dans Berneau, nous sommes obligés de nous arrêter : défilé de troupes boches pendant une heure !!
Nous sommes interpellés à différentes reprises par des officiers : ils me demandent pourquoi je pars et où je vais ? A la réponse que notre maison est brulée, ils répliquent « civilis hat geschosen ! ». Les soldats nous narguent, rient, nous invitant à partir avec eux ! Un sous-officier visite notre chariot.
Une troupe d’officiers et soldats défilent, se dirigeant vers Berneau; ils ont la boutonnière fleurie, ils sont ivres, crient, chantent. Beaucoup sont sans armes, heureusement pour nous ! Les derniers escortent des voitures et charrettes chargées d’objets les plus divers, même des poupées ! Ils nous causent, veulent absolument porter les enfants, nous forcent à accepter une bouteille de vin, volée peut-être chez moi ! L’un des soldats a dans sa poche des serviettes à thé volées chez moi. Un officier donne un bonbon à la petite Suzanne !
Enfin, nous arrivons à la route de Fouron-le-Comte après avoir naturellement traversé Berneau.
Berneau ! Quelle dévastation ! tout est brulé et les meubles des maisons gisent sur la rue, brisés par la soldatesque teutonne. Un portrait du curé est suspendu devant sa demeure et les soldats se sont amusés à lui crever les yeux !
Après cette triste promenade, nous apercevons, ô bonheur, « la Maison Blanche », c’est la Hollande ! c’est le salut ! c’est la quiétude après 12 jours et 12 nuits passées sous la domination des boches !
Nous arrivons à Eysden; nous sommes reçus cordialement par le Comte de Geloes, nous y rencontrons Mme de Wilde; nous y voyons aussi Lambertine, Maria et Marcel; Denis est emmené prisonnier en Allemagne ! (Il s’agit de la famille Houlteau)
A 4h, départ pour Maestricht, c’est le 1er voyage de Suzette en chemin de fer ! Nous sommes avec la famille DOSSIN-LENOIR et faisons une entrée sensationnelle dans la ville avec voiture, enfants et chariot !
Irma, Maria, Phine et les plus jeunes enfants sont emmenés en voiture au comité des réfugiés, rue de Bruxelles. Je suis conduit avec les aînés à l’hôtel de ville.
Le commissaire de police me demande si j’ai des connaissances à Maestricht. Je désigne Monsieur Marcel BOSCH. On téléphone, c’est décidé, nous partons chez Monsieur BOSCH, 61, rue Droite. Réception cordiale, nous logeons tous là pendant 2 jours.
Jeudi 20 août
Sur les instances du bon et généreux ami Louis HUSTINX, je conduis à Bunde Léon, Hortense, Marie et Charles. Le samedi suivant, la chère et dévouée Marie HUSTINX, à qui nous devons toute notre reconnaissance, vient chercher en auto Irma et Suzette. Léon et Charles rentrent alors à Maestricht. Quinze jours après, ils sont en séjour chez M. MARRES – HERMANS, rue de Bruxelles.
En octobre, Hortense et Marie entrent en pension chez les frères franciscains. Je vais en séjour chez Louis avec Lucie, Léon et Charles partant pour Verviers chez Lucie. Ils sont conduits en auto avec le père jésuite GORONNE et vont suivre les cours à Verviers au collège des R.P. Jésuites.
Maria reste en séjour chez BOSCH comme Maurice, Albert et Phine .
En décembre, Albert vient nous rejoindre à Bunde. Phine est rentrée à Visé.
Vers la mi-septembre, Maria rentre à Visé, nos valeurs et bijoux enfouis dans le jardin ont disparu !!
Au commencement de novembre, nous entendons raconter que des valeurs volées à un médecin de Visé ont été retrouvées à Tongres ! Après informations à Tongres, nous apprenons avec bonheur que nos valeurs ont été enfouies, avec les siennes, par le bourgmestre de Tongres, le notaire Delvigne. Voici ce qui m’a été rapporté : les valeurs et bijoux ont été volés à Visé par les soldats teutons. Un officier allemand a voulu les négocier à Tongres, chez le banquier de SCHAETZEN. Ce dernier a averti le commandement allemand à Tongres qui a déclaré que ce n’était pas là du butin de guerre et le tout a été mis en dépôt chez le bourgmestre. Il y avait plusieurs titres nominatifs et un livret de coopérateur à mon nom.
Depuis le 18 août, la famille est hébergée en Hollande. Le récit reprend le 11 février 1915, soit 5 mois et 24 jours plus tard.
Jeudi 11 février
Maurice et Lucie arrivent en Hollande, amenant Léon et Charles pour partir en Angleterre.
Mardi 16 février
Départ pour l’Angleterre à 6h du matin. A Maestricht, nous retrouvons Maria, Léon, Charles et Maurice. Maria BIKA de Cheratte nous accompagne comme servante.
Lucien LOCHT nous accompagne jusqu’à Flessingen et ses deux soeurs, Jeanne et Madeleine, font route avec nous jusque Folkestone.
Arrivés à Flessingen à 12h, nous y trouvons, horreur !, beaucoup d’officiers allemands à la Croix-Rouge. Un commandant hollandais m’apostrophe grossièrement parce que je porte la décoration belge ! J’enlève les trois couleurs après les 3 sommations en protestant que je ne suis pas habitué à des manières grossières et sans tact ! A bas les Allemands et leurs amis !
A 2h, visite au consulat pour le visa des passeports. Irma, Maria et Titine doivent être présentes et les enfants restent dans la gare, sous la garde d’une dame de Flessingen.
A 5h 1/2 !! nous quittons le consulat.
A 6h 1/2 je vais prendre les billets pour le bateau, que nous avions retenu par télégramme. Malheureusement, les cabines sont occupées par des soldats anglais blessés qui retournent en Angleterre !! Nous devons aller loger dans le bateau Deutschland ! Horreur ! Quelle nuit ! Le bateau est rempli de gens de toutes catégories !
Mercredi 17 février
A 7 heure, nous quittons le fameux bateau et tout à fait sans regrets !
A 7h 1/2, on s’embarque sur le Mecklenburg Cie Zeeland. Départ à 8h.
Traversée épouvantable, il pleut, il vente, la mer est très démontée ! Aussi quelles scènes sur le pont ! C’est vraiment dégoûtant ! A un moment donné, tout le monde roule sur le pont dans le vomitum.
Arrivée à Folkestone vers 18h. Visite médicale, sortie à 20h.
Jeanne et Madeleine LOCHT nous quittent. A ce moment, sur le quai de la gare mal éclairé passe un groupe de volontaires belges drapeau en tête : ils chantent « A bas l’Allemagne, vive la Belgique, bis, van de deutsches geen schrik ! ».
Nous sommes conduits à 21h en autocar au bureau des réfugiés: souper. A 22h, nous gagnons une maison pour y loger.
Jeudi 18 février
A 10h, visite du comité pour viser les passeports.
11h, départ pour Londres après avoir envoyé un télégramme au Courrier de la Meuse à Maestricht « Irma et Léon bien arrivés ».
13h 1/2, Victoria Station, départ pour le Ring en car. Pendant la route nous croisons un cortège de volontaires belges, précédé du drapeau national. Cette vue nous arrache des larmes, vive la Belgique.
Vous pouvez voir et/ou télécharger le manuscrit de Léon-Félix ICI
• Les mêmes événements, mais relatés par une religieuse de l’hospice de Visé, sont lisibles et téléchargeables ICI.
Super merci à Marylène Zecchinon, conservatrice du Musée régional de Visé et à Claude Fluchard, président de la Société Royale Archéo-Historique de Visé (SRAHV) pour avoir relu ce texte et corrigé les erreurs dans les noms propres de lieux et de famille (ainsi que les fautes d’orthographe résiduelles !)
• Un autre récit, plus général, de l’invasion de Visé est donné par le major Collyns et consultable à cette adresse :
http://www.arquebusiers.be/Defense-de-Vise.htm
Visé, 1ère ville martyre de Belgique
15 août 1914
Jean-Pierre Lensen
Editions de la Province de Liège
https://www.bibliomania.be/item/12007662/vise_1ere_ville_martyre_de_belgique_le_15_aout_1914
Des témoignages tels que ceux livrés par le Dr Léon Haulet donnent un tout autre sens à ce qu’est la guerre, vue et vécue par la population civile … Victime innocente, impuissante, soumise à une barbarie gratuite.
Un uniforme transforme-t-il nécessairement un homme en bête impitoyable …?